JADC Express – Numéro 3 2013

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Numéro 3, 2013   

Les versions intégrales des articles présentés dans le JADC Express sont disponibles gratuitement pour une période d'un mois.

Photopolymérisation : considérations en matière de santé et de sécurité

Dans ce numéro du JADC Express, le Dr Richard Price, professeur et directeur du service de prosthodontie fixe au Département des sciences dentaires cliniques de la Faculté de médecine dentaire de l’Université Dalhousie, présente 3 articles qui traitent de facteurs liés à la santé et à la sécurité qui doivent être pris en compte durant la photopolymérisation des résines dentaires.

Dr Richard Price

Introduction

  • Durant la mise en place de restaurations à base de résine, il est essentiel d’assurer une photopolymérisation adéquate de toute la restauration; ceci améliore les propriétés physiques de la résine et permet d’obtenir une meilleure résistance d’adhésion ainsi qu’une meilleure stabilité de la teinte. À l’inverse, une photopolymérisation inadéquate peut avoir des effets négatifs sur la santé et la sécurité du patient.
  • Les 2 premiers articles examinés traitent de la lixiviation de substances chimiques contenues dans les résines dentaires, causée par une photopolymérisation inadéquate. Il peut y avoir sous-polymérisation lorsque la distance entre l’embout de la lampe à polymériser et la résine est trop grande, que le conduit de lumière est mal positionné au-dessus de la résine ou qu’on utilise une lampe à polymériser ou un temps d’exposition inappropriés. 
  • L’article-vedette du numéro de décembre 2012 du Journal of the American Dental Association fait état d’une augmentation des concentrations salivaires et urinaires de bisphénol A (BPA) et d’autres substances chimiques après la mise en place de restaurations dentaires en résine composite1. Ces résultats sont préoccupants compte tenu des effets nocifs du BPA chez les humains, que l’on pense notamment à l’altération de la santé psychosociale des enfants exposés à des quantités accrues de résines composites à base de bisGMA 2.
  • En mars 2013, l’American Dental Association a publié une excellente revue de la littérature sur les risques pour les patients dentaires associés au BPA contenu dans les résines dentaires.
  • Bien qu’on ne connaisse pas encore parfaitement les répercussions d’une exposition accrue au BPA, les dentistes devraient prendre des mesures pour réduire au minimum l’exposition des patients à l’ensemble des produits chimiques utilisés durant les traitements dentaires. Comme l’indique ci-après l’article de Durner et coll., le BPA n’est pas la seule substance chimique libérée des résines.
  • Le dernier article expose 3 cas de brûlure des tissus mous chez des patients ayant reçu des soins buccodentaires de routine avec une lampe à polymériser à diode électroluminescente (DEL). Il est important de rappeler que la puissance accrue des lampes à polymériser s’accompagne d’une augmentation du risque de lésions thermiques iatrogènes.

Des résines composites sous-polymérisées peuvent libérer de plus grandes quantités de substances chimiques dans l’organisme

Durner J, Obermaier J, Draenert M, Ilie N. Correlation of the degree of conversion with the amount of elutable substances in nano-hybrid dental composites. Dent Mater. 2012;28(11):1146-53.

Perle clinique du JADC : Cette étude in vitro indique une forte corrélation inverse entre le degré de conversion des résines composites et l’élution de substances chimiques contenues dans ces résines, et insiste sur l’importance d’assurer une exposition lumineuse adéquate.

Points clés :

  • Cette étude compare le degré de conversion de 3 résines composites d’usage courant (Venus Diamond, Tetric EvoCeram et Filtek Supreme) et la quantité de substances chimiques éluées en fonction du temps d’exposition à la lumière (5, 10, 20 et 40 s), durant la polymérisation avec la lampe à DEL FreeLight 2 (3M ESPE).
  • Dans tous les groupes, la diminution du temps d’exposition à la lumière a réduit sensiblement le degré de conversion et augmenté l’élution de substances – notamment de camphorquinone, d’acide méthacrylique, de diméthacrylate d’éthylène glycol, de méthacrylate d’hydroxy-2-éthyle (HEMA), d’ester d’éthyle de l’acide 4-N,N-diméthylaminobenzoïque (DMABEE), de diméthacrylate de triéthylèneglycol (TREGDMA), de Tinuvin P et de diméthacrylate de BPA-polyéthylène glycol (BisEMA) – provenant des résines composites.

Raisons de recommander cet article : Cette étude souligne le risque accru d’élution de substances chimiques potentiellement toxiques, lorsque 3 résines dentaires d’usage courant ont été sous-polymérisées. Les temps de polymérisation plus courts (5 et 10 s) ont été associés à un plus faible degré de conversion et à l’élution de plus grandes quantités de substances chimiques potentiellement toxiques que les temps plus longs (20 ou 40 s). Les cliniciens devraient en outre savoir que la sous-polymérisation des résines dentaires augmente la libération non seulement de BPA – mais aussi d’autres substances chimiques.

Les adhésifs orthodontiques sous-polymérisés peuvent libérer du BPA dans l’organisme

Sunitha C, Kailasam V, Padmanabhan S, Chitharanjan AB. Bisphenol A release from an orthodontic adhesive and its correlation with the degree of conversion on varying light- curing tip distances. Am J Orthod Dentofacial Orthop. 2011;140(2):239-44.

Perle clinique du JADC : La résine adhésive qui retient les boîtiers orthodontiques sur les dents doit être suffisamment polymérisée. À cette fin, il convient de porter une attention particulière à la distance entre la résine et l’embout de la lampe à polymériser, car même une distance de 5 mm réduit sensiblement le degré de conversion et augmente la libération de BPA.

Points clés :

  • Cette étude in vitro examine les effets résultant de l’utilisation de distances variées (0, 5 et 10 mm) entre l’embout de la lampe et la résine, durant la polymérisation d’une résine adhésive orthodontique (Transbond XT, 3M Unitek).
  • La face buccale des boîtiers a été exposée pendant 40 secondes à une lampe à polymériser à halogène.
  • La libération de BPA a été évaluée jusqu’à 35 jours après la photopolymérisation.
  • Les échantillons polymérisés à une distance de 5 et 10 mm ont libéré beaucoup plus de BPA et présenté un degré de polymérisation nettement moindre que ceux polymérisés à une distance de 0 mm.

Raisons de recommander cet article : Il est important d’assurer une photopolymérisation adéquate, autant en dentisterie restauratrice qu’en orthodontie. Durant le scellement des boîtiers orthodontiques, les cliniciens doivent s’assurer de polymériser adéquatement la résine adhésive, tout en évitant de surchauffer la pulpe ou les gencives. Il convient également de rappeler que les enfants sont non seulement ceux qui reçoivent le plus de traitements orthodontiques, mais également les sujets les plus sensibles aux effets nocifs du BPA.

Les lampes à polymériser à DEL peuvent brûler les tissus mous

Spranley TJ, Winkler M, Dagate J, Oncale D, Strother E. Curing light burns. Gen Dent. 2012;60(4):e210-4.

Perle clinique du JADC : Les cliniciens doivent être conscients qu’une lampe à polymériser de grande puissance qui est mal utilisée peut brûler les tissus mous. Les brûlures ainsi créées ressemblent à des ulcérations et ne sont donc pas nécessairement attribuées à la polymérisation. Les cliniciens doivent donc s’assurer que la lampe n’est pas dirigée sur les lèvres, la langue ou d’autres tissus intra-buccaux, et qu’elle n’entre pas en contact avec ces structures.

Points clés :

  • L’article expose 3 cas cliniques où les lèvres des patients ont été brûlées par une lampe à polymériser à DEL. Comme ces patients étaient sous anesthésie, les brûlures des tissus mous n’ont été détectées qu’après la fin du traitement.
  • L’utilisation d’une digue n’ayant offert aucune protection, les auteurs recommandent de placer une gaze entre la digue et les tissus mous.
  • Les auteurs recommandent également de faire une pause de 2 à 3 minutes, après chaque période de 20 secondes d’exposition des tissus mous à la lumière, pour permettre un refroidissement adéquat des tissus.

Raisons de recommander cet article : Ces études de cas font ressortir les risques potentiels pour les tissus mous qui sont associés à l’utilisation d’une lampe à polymériser de grande puissance. Les cliniciens ne devraient pas augmenter arbitrairement le temps d’exposition au-delà de la durée recommandée par le fabricant, sans savoir quels effets cela aura sur l’état des tissus mous ou de la pulpe. Les dentistes ne disposent actuellement d’aucune méthode pratique leur permettant d’évaluer la hausse intra-buccale de la température causée par l’utilisation de la lampe à polymériser. De plus, ils ne peuvent se fier aux patients pour leur indiquer si les tissus deviennent trop chauds, car ces patients sont souvent sous anesthésie. Le dentiste peut toutefois diriger la lampe à polymériser sur le dos de sa main pendant le même temps d’exposition, pour avoir une idée du risque de brûlure des tissus mous qui est associé à l’utilisation de la lampe à polymériser.

Ressources additionnelles

  1. Kingman A, Hyman J, Masten SA, Jayaram B, Smith C, Eichmiller F, et al. Bisphenol A and other compounds in human saliva and urine associated with the placement of composite restorations. J Am Dent Assoc. 2012;143(12):1292-302.
  2. Maserejian NN, Trachtenberg FL, Hauser R, McKinlay S, Shrader P, Tavares M, et al. Dental composite restorations and psychosocial function in children. Pediatrics. 2012;130(2):e328-38.
   


Le JADC est l'organe officiel de l'Association dentaire canadienne, offrant un dialogue entre l'association nationale et la communauté dentaire. Il sert à publier d'intéressants articles scientifiques et cliniques et à informer les dentistes sur des sujets importants pour la profession.

Notes et nouvelles

Le JADC tient à remercier chaleureusement les éditeurs des articles sélectionnés qui ont accepté de donner accès gratuitement aux articles intégraux jusqu'au 13 avril 2013.

Dental Materials
(éditeur : Elsevier)

American Journal of Orthodontics and Dentofacial Orthopedics
(éditeur : Elsevier)

General Dentistry
(éditeur : Academy of General Dentistry)

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