Traitement des patients atteints de parodontite ulcérative nécrosante

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Parodontite ulcérative nécrosante (PUN)

La parodontite ulcérative nécrosante (PUN) se caractérise par une nécrose des tissus mous, la destruction rapide du parodonte et la perte d’os interproximal. Contrairement à d’autres maladies parodontales, cette affection s’accompagne d’une importante nécrose des tissus gingivaux et de la perte de ligament parodontal et d’os alvéolaire.

Présentation

Population

  • Habituellement : jeunes adultes (de 18 à 30 ans); parfois : enfants dénutris ou personnes immunodéprimées

Facteurs de risque

  • Les patients immunosupprimés incluant, sans en exclure d’autres, les patients séropositifs – la séropositivité accompagnée d’une numération des CD4 inférieure à 200 est le facteur de prédisposition le plus fortement associé à la PUN
  • Malnutrition grave
  • Tabagisme
  • Mauvaise hygiène buccodentaire
  • Stress émotionnel ou psychologique inhabituel
  • Séquelles d’épisodes isolés ou multiples de gingivite ulcérative nécrosante (GUN)

Signes

  • Parodontite localisée ou généralisée, avec apparition rapide ou soudaine d’une douleur atroce intense
  • La PUN se caractérise par une nécrose des tissus gingivaux et la perte de ligament parodontal et d’os alvéolaire (ill. 1)
  • Zone érythémateuse linéaire séparant la zone ulcérée de la gencive libre adjacente, gencive attachée et saignement (spontané ou après provocation) de la muqueuse alvéolaire
  • Perte importante d’attache parodontale
  • La formation de poches profondes n’est pas évidente (épithélium de jonction nécrosé)
  • Douleur irradiante intense et haleine fétide dues à la nécrose des tissus
  • Il y a parfois exposition de l’os, qui entraîne une nécrose puis un séquestre osseux
  • Il peut y avoir adénopathie, fièvre et malaise
  • Microbiote caractéristique : bactéries fusiformes, Prevotella intermedia, Porphyromonas gingivalis, Treponema sp. et Candida albicans (prévalence accrue chez les patients séropositifs)

Ill. 1 : Perte d’attache généralisée et papilles tronquées. Pseudomembrane recouvrant la gencive érythémateuse et saignement spontané (photo reproduite avec l’aimable autorisation du Dr Eraldo Batista).

Symptômes

  • Douleur atroce intense 

Évolution

  • Non traitée, l’infection peut entraîner la destruction rapide de l’attache parodontale.
  • Le traitement permet de contrôler la progression de la perte d’attache clinique. Cependant, les tissus parodontaux touchés présenteront des séquelles avec récession et perte des papilles interdentaires.
  • Chez les personnes infectées par le VIH, la probabilité cumulative de décès dans les 24 mois suivant un diagnostic de PUN est de 72,9 %.

Investigation

  1. Antécédents médicaux détaillés, incluant les habitudes alimentaires et les comportements en matière de santé.

  2. Une consultation médicale peut être nécessaire pour exclure toute maladie immunosuppressive. La PUN a été associée à des patients séropositifs et atteints du sida.

  3. Antécédents dentaires : antécédents de GUN ou de maladies parodontales, goût métallique désagréable, salive pâteuse, douleur atroce intense.

  4. Examen extra-buccal : recherche d’adénopathies de la tête et du cou, d’asymétrie faciale.

  5. Examen intra-buccal : recherche des manifestations cliniques de la PUN.

Diagnostic

Le diagnostic de PUN repose sur l’examen clinique.

Diagnostic différentiel

  • Gingivo-stomatite herpétique aigüe
  • Gingivite desquamative
  • Agranulocytose
  • Leucémie
  • Noma
  • Stomatite nécrosante
  • Parodontite chronique

Traitement

Traitements initiaux courants

  1. Procéder au débridement sous anesthésie locale, y compris à un détartrage en douceur.

  2. Éliminer la pseudomembrane à l’aide de boulettes de coton trempées dans la chlorhexidine 0,12 %.

  3. Donner au patient des instructions précises en matière d’hygiène buccodentaire et lui prescrire un rince-bouche antibactérien (chlorhexidine 0,12 %, 2 fois par jour) ou un rince-bouche à base de peroxyde d’hydrogène (2 fois par jour).

  4. Indiquer au patient de prendre des analgésiques pour soulager la douleur (ibuprofène, 400 à 600 mg, 3 fois par jour, ou acétaminophène, 750 mg, 3 fois par jour).

  5. Donner des conseils au patient : maintenir une bonne alimentation, prendre des suppléments vitaminiques, éviter les aliments épicés, maintenir un apport adéquat de liquides, dormir davantage, réduire le stress et, dans la mesure du possible, cesser de fumer.

  6. Prescrire des antibiotiques s’il y a des signes d’atteinte systémique (p. ex. fièvre, malaise, adénopathies) :
    • Amoxicilline, 500 mg, 3 fois par jour pendant 7 jours; ou
    • Amoxicilline (250 mg) et métronidazole (250 mg), 3 fois par jour pendant 7 jours.

Il importe de consulter le médecin traitant si vous prescrivez des antibiotiques à un patient immunodéprimé (p. ex. sida, séropositivité, leucémie, neutropénie cyclique). Le risque de surinfection par les Candida présentes dans la cavité buccale doit être pris en compte durant l’administration d’antibiotiques à action systémique chez les patients immunodéprimés. Chez ces patients, un antifongique pourrait être nécessaire.

Suivi

Le traitement des patients immunodéprimés doit se faire en étroite collaboration avec le médecin. Selon le degré d’immunodépression chronique, il pourrait être indiqué d’opter uniquement pour des procédures conservatrices minimalement invasives et de surveiller le patient de près.

  1. Évaluer les résultats du traitement après 24 heures, puis tous les 2 jours, jusqu’à la résolution de tous les signes et symptômes aigus. Il est également essentiel de dispenser de fréquents traitements parodontaux de maintien et de maintenir une hygiène buccodentaire rigoureuse, car la PUN peut continuer d’évoluer rapidement.

  2. Après la première consultation ou la stabilisation du stade aigu, il est recommandé de diriger le patient vers un parodontiste ou un chirurgien buccal.

  3. Faire un suivi, incluant une évaluation parodontale complète.

LES AUTEURES

 

La Dre Todescan est professeure adjointe au Département de diagnostic et de chirurgie, Faculté de médecine dentaire, Université du Manitoba, Winnipeg (Manitoba).

 

La Dre Atout est professeure adjointe au Département de diagnostic et de chirurgie, Faculté de médecine dentaire, Université du Manitoba, Winnipeg (Manitoba).

Écrire à : Dre Sylvia Todescan, Diagnostic dentaire et sciences chirurgicales, Université du Manitoba, pavillon D344, 790, avenue Bannatyne, Winnipeg (Manitoba) R3E 0W2. Courriel : todescan@cc.umanitoba.ca

Les auteures n’ont aucun intérêt financier déclaré.

Cet article a été revu par des pairs.

Ressources suggérées

  1. Batista EL Jr, Novaes AB Jr, Calvano LM, do Prado EA, Goudouris ES, Batista FC: Necrotizing ulcerative periodontitis associated with severe congenital immunodeficiency in a prepubescent subject: clinical findings and response to intravenous immunoglobulin treatment. J Clin Periodontol. 1999; 26(8): 499–504.
  2. Corbet EF. Diagnosis of acute periodontal lesions. Periodontol 2000. 2004;34:204-16.
  3. Klokkevold PR. Necrotizing ulcerative periodontitis. In: Newman MG, Takei H, Klokkevold PR, Carranza FA, editors. Carranza’s Clinical Periodontology. 11th ed. St. Louis: Saunders; 2012. p.165-8.
  4. Novak MJ. Necrotizing ulcerative periodontitis. Ann Periodontol. 1999;4(1):74-7.
  5. Rees TD. Pathology and management of periodontal problems in patients with HIV infection. In: Newman MG, Takei H, Klokkevold PR, Carranza FA, editors. Carranza’s Clinical Periodontology. 11th ed. St. Louis: Saunders; 2012. p.181.