Comment dois-je traiter un patient atteint d’ulcères aphteux?

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Ulcères aphteux (aussi désignés stomatite aphteuse ou aphtes)

Ulcérations isolées ou multiples de la muqueuse buccale, habituellement spontanément résolutives, douloureuses ou récurrentes.

Présentation

Population

  • Apparaît habituellement durant l’enfance ou au début de l’âge adulte
  • Les femmes sont plus souvent atteintes que les hommes

Signes

Ulcérations aphteuses mineures (ill. 1)

  • Pourcentage approximatif des cas : 80 %
  • Forme et dimensions : ulcères ronds à ovoïdes, de 2 à 8 mm de diamètre, entourés d’un mince halo érythémateux
  • Siège (habituel) : muqueuse buccale non kératinisée
  • Temps de guérison : 10 à 14 jours
  • Risque de formation de cicatrices : non

Ulcérations aphteuses majeures (ill. 2)

  • Pourcentage approximatif des cas : 10 à 15 %
  • Forme et dimensions : ulcères ronds à ovoïdes, de plus de 10 mm de diamètre
  • Siège : muqueuse buccale kératinisée et non kératinisée 
  • Temps de guérison : 2 à 8 semaines
  • Risque de formation de cicatrices : oui

Ulcérations aphteuses herpétiformes (ill. 3)

  • Pourcentage approximatif des cas : 5 à 10 %
  • Forme et dimensions : éruptions récurrentes de multiples (100+) petits (2 à 3 mm) ulcères douloureux, qui souvent fusionnent pour former de plus gros ulcères irréguliers 
  • Siège : muqueuse buccale kératinisée et non kératinisée 
  • Temps de guérison : 10 à 14 jours
  • Risque de formation de cicatrices : non

Ill. 1 : Ulcère aphteux mineur

Ill. 2 : Ulcères aphteux majeurs

Ill. 3 : Ulcération aphteuse herpétiforme



Symptômes

L’intensité de la douleur dépend de la variante, mais elle est souvent disproportionnée à la taille des lésions.

Facteurs déclenchants

  • Divers facteurs peuvent précipiter les atteintes, notamment un traumatisme localisé, le stress, certains additifs ou agents de conservation alimentaires (p. ex.  cinnamaldéhyde, benzoate de sodium), certains médicaments, des changements hormonaux, une carence vitaminique (vitamine B12, acide folique), une carence en fer, l’abandon du tabac et une sensibilité possible au dodécyl sulfate de sodium.
  • Des facteurs génétiques, immunologiques et microbiens ont aussi été mis en cause dans la manifestation des ulcères aphteux récurrents.
  • Des ulcères aphteux récurrents peuvent être un signe d’une maladie systémique sous-jacente telle que la maladie cœliaque ou la maladie inflammatoire intestinale, la vascularite (p. ex. maladie de Behçet), l’arthrite réactionnelle (p. ex. syndrome Reiter) et le VIH/sida.

Investigation

  • Faire un examen extra-buccal (tête et cou) et intra-buccal complet.
  • Passer en revue les antécédents dentaires pour exclure toute pathologie locale qui pourrait être à l’origine de la douleur. Parmi les pathologies courantes possibles, mentionnons une ulcération traumatique causée par la fracture d’une restauration, d’une dent ou d’une prothèse.

Exclure les pathologies systémiques

Examiner en détail les antécédents médicaux du patient à la recherche de :

  • troubles gastro-intestinaux (p. ex. maladie cœliaque/maladie intestinale inflammatoire)
  • troubles hématologiques (p. ex. carence en fer)
  • troubles nutritionnels (p. ex. carences vitaminiques)
  • troubles immunologiques (p. ex. VIH/sida maladie de Behçet)

Diagnostic

Le diagnostic d’ulcère aphteux est basé sur l’examen clinique et les antécédents médicaux du patient.

Traitement

Traitements initiaux courants

Les stratégies de traitement visent à soulager les symptômes par :

  • la réduction de la douleur
  • la prévention des récidives
  • l’accélération de la guérison des ulcères

Atteinte bénigne (ulcères aphteux mineurs)

Analgésiques/anti-inflammatoires topiques

  • Pâtes analgésiques topiques [p. ex. benzocaïne 20 %] (pour atténuer la douleur) : appliquer au besoin
  • Rince-bouche à base de chlorhydrate de benzydamine [p. ex. Tantum®] (pour atténuer la douleur causée par les ulcères) : appliquer 4 fois par jour pendant 2 semaines ou jusqu’à ce que les ulcères soient guéris
  • Lidocaïne 5 % en gel/xylocaïne visqueuse (pour atténuer la douleur causée par les ulcères) : rincer et cracher, au besoin
  • Bioadhésifs protecteurs [p. ex. Orabase®] (pour atténuer la douleur) : appliquer au besoin

Antimicrobiens

  • Rince-bouche à base de chlorhexidine 0,12 % (pour atténuer la douleur causée par les ulcères et accélérer la guérison) : utiliser le rince-bouche 2 fois par jour pendant 2 semaines ou jusqu’à ce que les ulcères soient guéris

Corticostéroïdes topiques

  • Triamcinolone 0,1 % [p. ex. Kenalog dans Orabase®, Oracort®] (pour atténuer la douleur et l’inflammation) : appliquer 3 ou 4 fois par jour pendant 5 jours

Traitement aigu des atteintes graves

Corticostéroïdes (agents topiques à dose forte, habituellement utilisés en association avec des antifongiques prophylactiques ou des médicaments à action générale). Envisager l’aiguillage du patient vers un professionnel de la santé ayant des connaissances ou des compétences avancées dans la prise en charge des patients qui prennent ce type de médicaments.

Traitement physique

  • Ablation chirurgicale
  • Ablation par laser
  • Cautérisation chimique

Immunomodulation

  • Thalidomide
  • Pentoxifylline
  • Colchicine

Conseils

  • Les patients qui présentent de fréquents épisodes récurrents d’ulcères aphteux devraient être dirigés vers un spécialiste en médecine buccale/pathologie buccale ou leur médecin, afin d’écarter toute association systémique possible avec la stomatite aphteuse récurrente.
  • Les analyses en laboratoire peuvent inclure la formule sanguine complète avec formule leucocytaire, le dosage du fer sérique/de l’acide folique/de la vitamine B12 et d’autres analyses (s’il y a lieu) pour exclure toute autre affection systémique sous-jacente possible.
  • Il pourrait également être nécessaire d’effectuer des analyses pour exclure la maladie cœliaque.
  • Une évaluation plus en profondeur doit être faite si l’ulcère (qu’il soit douloureux ou non) persiste pendant plus de deux semaines, afin d’exclure les affections suivantes :
    • Cancer
    • Autres infections (p. ex. virus de l’herpès simplex, infection fongique)
    • Maladies cutanéo-muqueuses chroniques (p. ex. lichen plan, pemphigus, pemphigoïde)

L’AUTEUR

 

Le Dr Clark est directeur clinique des services dentaires au Ontario Shores Centre for Mental Health Sciences et professeur agrégé de dentisterie clinique au Département de médecine buccale, Faculté de médecine dentaire, Université de Toronto.

Écrire au : Dr David Clark, Ontario Shores Centre for Mental Health, 700, rue Gordon, Whitby (Ontario)  L1N 5S9. Courriel : clarkd@ontarioshores.ca

L’auteur n’a aucun intérêt financier declare.

Cet article a été revu par des pairs.

Ressources suggérées

  1. Preeti L, Magesh KT, Rajkumar K, Karthik R. Recurrent apthous stomatitis. J Oral Maxillofac Pathol. 2011;15(3):252-6.
  2. Rashid M, Zarkadas M, Anca A, Limeback H. Oral manifestations of celiac disease: a clinical guide for dentists. J Can Dent Assoc. 2011;77:b39.
  3. Scully C. Clinical practice. Apthous ulceration. N Eng J Med. 2006;355(2):165-72.