L'utilisation des services dentaires par les immigrants au Canada

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La littérature récente a établi que la santé de la population canadienne née à l'étranger diffère de celle de la population née au pays. On a ainsi observé un «effet de l'immigrant en bonne santé» : l'état de santé des immigrants serait bon à leur arrivée, mais en aussi peu que 5 ou 10 ans, il se détériorerait pour devenir inférieur à celui de la population née au pays. Même si nous en savons beaucoup sur l'état de santé et sur les comportements en matière de santé de la population canadienne née à l'étranger, nous en savons relativement peu sur son utilisation des services dentaires.Objectif : Partant de l'hypothèse selon laquelle les personnes nées à l'étranger feraient une moins grande utilisation des services de soins dentaires que les Canadiens de naissance, les auteurs ont effectué une étude visant à repérer les facteurs associés aux visites chez le dentiste des Canadiens de 12 ans et plus et à comparer l'utilisation des services dentaires par la population née à l'étranger à celle de la population née au Canada.Méthodologie : En utilisant l'Enquête nationale sur la santé de la population de Statistique Canada pour 1996–1997, une étude longitudinale de la population canadienne, les auteurs ont utilisé des techniques statistiques descriptives et multidimensionnelles afin de mieux comprendre la fréquence d'utilisation des services dentaires et les raisons de cette utilisation parmi la population immigrante. Les résultats ont été comparés à ceux de la population née au pays. Les différences dans la structure d'âge et de sexe des populations née à l'étranger et née au pays ont été contrôlées par des standardisations selon l'âge et le sexe et des techniques à plusieurs variables. Résultats : Les données montrent que les personnes nées à l'étranger étaient un peu plus susceptibles d'avoir été chez le dentiste dans l'année qui précédait l'enquête que les personnes nées au pays. Cette difference s'accroissait lorsqu'on tenait compte des differences d'âge et de sexe des 2 populations. Aucune surprise du côté des facteurs associés à l'utilisation des services dentaires : on constatait une correlation entre un niveau d'éducation plus élevé, un revenu plus élevé et la présence d'un régime de soins dentaires, d'une part, et un taux d'utilisation plus élevé des services dentaires, d'autre part. Un âge plus avancé, au contraire, était lié à une utilisation inférieure. Parmi les immigrants, les nouveaux arrivants (ceux qui sont au pays depuis moins de 5 ans) et les personnes d'origine asiatique étaient moins susceptibles d'avoir utilisé les services d'un dentiste. Même si les personnes nées à l'étranger et nées au pays étaient tout aussi susceptibles d'aller chez le dentiste en raison du remboursement des frais par un régime, les immigrants semblaient plus susceptibles de prendre rendez-vous pour le traitement d'un problème, alors que les personnes nées au pays étaient plus susceptibles de prendre rendez-vous pour des soins préventifs.Conclusions : Même s'ils représentent une population potentiellement vulnérable sur le plan de la santé dentaire, les personnes nées à l'étranger vivant au Canada faisaient un plus grand usage des services dentaires que les Canadiens de naissance. Néanmoins, l'arrivée récente, le manque d'accès à un régime de soins dentaires adéquat et d'autres facteurs (comme la maîtrise de l'anglais ou des barrières sociales ou culturelles, y compris les rôles sexuels dans certaines cultures) peuvent restreindre l'utilisation des services dentaires et constituer des obstacles à l'accès aux soins au sein de la population immigrante.